POLIS, POLITEIA, POLITIA, POLLICE, POLICE.
Le mot " police " appelle quelques précisions terminologiques. Il vient du latin politia qui, lui-même, trouve son origine dans le grec politeia (art de gouverner la cité), lequel dérive du mot polis (cité, ville). En vieux français, pollice signifiait " gouvernement ". Au fil des ans, le mot s'est limité à la gestion d'une cité pour acquérir son sens actuel d'organe, de règle et de mission permettant d'assurer le maintien et le rétablissement de l'ordre public.
IL Y A LONGTEMPS…
A la chute de l'empire romain, les édiles chargés de la police disparaissent. Le pouvoir est atomisé entre une multitude de seigneurs féodaux. Maîtres de leurs fiefs, ils y exercent tous les pouvoirs, y compris celui de justice.
Au haut moyen-âge, le pouvoir de police se confond avec celui de justice, le même seigneur élucidant l'infraction et châtiant son auteur.
Tout le travail de reconquête du pouvoir par les rois de France va consister à retirer progressivement des prérogatives aux seigneurs féodaux.
LA CAMPAGNE ET LES VILLES.
L'affermissement du pouvoir royal aux XIIème et XIIIème siècles réduit les affrontements entre féodaux, mais des batailles avec des puissances extérieures se déroulent sur notre territoire, pendant lesquelles les déserteurs et autres mercenaires licenciés pillent les pays. Un corps ancien, la maréchaussée, est chargé de contrôler et surveiller les gens de guerre. Ces gens d'armes ont compétence sur tout le royaume, à l'exception des villes. Ils sont requis lorsque le représentant local du roi est dépassé.
Au XIVème siècle, la hiérarchie royale s'établit comme suit : prévôt dans les prévôtés (de la taille d'une châtellenie ou fief, une grosse commune rurale d'aujourd'hui), bailli ou sénéchal dans les bailliages ou sénéchaussées (de la taille d'un comté, environ d'un quart département).
Ils cumulent des pouvoirs d'administration, de police et de justice. Cette hiérarchie est plus tard coiffée par les intendants, que l'on peut apparenter à nos préfets.
A côté de cette criminalité rurale, le développement des villes fait apparaître une délinquance typiquement urbaine.
CHEVALIER DU GUET ET COMMISSAIRES AU CHATELET (XIIIème et XIVème s.).
Des ordonnances de police vont tenter d'apporter des solutions à des problèmes ponctuels. Ainsi, pour Paris :
la création par Saint-Louis, en 1254 du chevalier du guet. Assisté de 20 sergents à cheval et de 26 sergents à pied, il est chargé d'assurer la sécurité de Paris la nuit. " Bonnes gens, dormez en paix ! ". Dans les années qui suivent, le dispositif se répand rapidement dans toutes les villes du royaume ;
la création en 1306 par Philippe le Bel des commissaires examinateurs au Châtelet. Egalement magistrats portant la longue robe, symbole du plein exercice du pouvoir judiciaire, ils sont chargés de lutter contre la criminalité dans un quartier de Paris ;
La création en 1526 du lieutenant criminel de robe courte (symbole du pouvoir judiciaire limité à sa mission) pour lutter contre les mendiants, vagabonds et autres marginaux. Il peut se faire assister par les commissaires examinateurs.
Aucune de ces mesures ne parvient cependant à juguler l'augmentation constante de la délinquance (la cour des miracles date du XVIème siècle) car il n'existe ni coordination, ni approche générale du problème. Ce constat est établi par l'édit de mars 1667 qui dispose que " les fonctions de justice et de police sont souvent incompatibles et trop étendues pour être exercées par un seul officier (fonctionnaire) ". Cet édit tente de remédier aux errements précédents.
LA LIEUTENANCE DE POLICE (1667 - 1789).
" La police consiste à assurer le repos du public et des particuliers, à protéger la ville de ce qui peut causer des désordres ". L'édit que présente Colbert à Louis XIV en mars 1667 résulte de l'évolution des mœurs françaises depuis quelques siècles en matière de sécurité publique. Il envisage une approche globale de la criminalité et constitue l'acte fondateur de la police sous l'ancien régime en clarifiant une situation héritée du moyen-âge.
La charge de lieutenant de police qu'il institue a pour but de créer un pouvoir autonome veillant à la bonne marche de la cité, quelque pression qu'il puisse subir.
Paris est la première ville concernée par cette mesure. Nicolas de la Reynie y est le premier lieutenant général de police, charge qu'il occupe de mars 1667 à janvier 1697. Juge puis maître des requêtes au conseil d'Etat, il a une connaissance complète des institutions. Tous les lieutenants généraux qui lui succéderont auront une formation analogue. Nommé par le roi, le lieutenant de police est révocable ad nutum.
Si l'édit confère au lieutenant de police certaines missions (la lutte contre la délinquance, l'incendie, l'inondation ; la police économique, des mœurs, etc), il laisse Nicolas de la Reynie organiser son administration en rassemblant sous son autorité les anciennes institutions.
Les commissaires examinateurs au Châtelet deviennent des commissaires de police, leur nombre est porté à 48. Répartis entre les 17 quartiers de Paris, ils rendent compte quotidiennement de leur activité au lieutenant général.
Nicolas de la Reynie compte aussi sur un réseau d'indicateurs rémunérés : les mouches en liberté et les moutons en prison.
Il peut aussi requérir les forces de l'armée, soit la maréchaussée d'Ile-de-France, soit la garde de Paris (environ un millier de gardes des portes et murailles de Paris).
Surtout, le lieutenant général de police s'appuie sur des bureaux (métiers, marchés, écoles, archives, etc.).
Informels sous la Reynie, ces bureaux sont officialisés par le marquis d'Argenson, qui succède à la Reynie de janvier 1697 à janvier 1718.
En 1708, il fait assister les commissaires de police par des inspecteurs de police, dont le nombre varie selon les crédits. Le chevalier du guet de Paris, aux ordres du lieutenant général de police, fournit le concours de ses 150 hommes.
Très rapidement, ce système du lieutenant de police a produit des effets remarquables sur la criminalité et est étendu à toutes les grandes villes du royaume. Il perdure jusqu'à la révolution.
LA REVOLUTION FRANCAISE (1789 - 1799).
En 1789, la police royale ne prévoit pas l'ampleur des troubles qui se multiplient depuis 1787. Elle va disparaître avec le régime.
Dès le 13 juillet 1789, soit la veille des émeutes au cours desquelles les portes de la Bastille sont forcées, une garde nationale de Paris se constitue pour assurer la sécurité intérieure et extérieure de la ville. Après le 14 juillet, la commune de Paris procède à l'élection d'une municipalité qui crée elle-même, le 25 juillet, un comité provisoire de police, sûreté et tranquillité, l'un des tous premiers comités.
Le rôle du lieutenant de police est alors assuré par le maire. Des lois d'août et septembre 1791 officialisent cette situation de fait et les villes de province se dotent de systèmes analogues.
Une loi du 27 juin 1790 tente une réorganisation de la police parisienne en créant 48 commissaires de police (soit un par section nouveau nom des quartiers), assistés dans chaque section par 16 commissaires de section. Ceux-ci deviennent bientôt (loi du 29 septembre 1791) des officiers de paix tandis que les commissaires de police sont placés sous les ordres directs du maire. Tous sont élus.
Au fur et à mesure du remaniement territorial (création des départements), cette organisation est appliquée aux villes de province en fonction des nécessités.
Devant l'intensification des troubles et les luttes de pouvoir, le comité de sûreté générale, puis le comité de salut public réorientent le travail de la police vers la lutte contre les " suspects ", c'est-à-dire tous citoyens aux sentiments révolutionnaires douteux qu'il convient de présenter au tribunal révolutionnaire.
Toutes d'exception, les lois sur la police sont innombrables.
Le Directoire crée le ministère de la police générale (la loi du 2 janvier 1796) dont le but est de lutter contre l'insécurité généralisée. Les législateurs veulent une police forte pour remédier aux troubles révolutionnaires persistants qui ne peuvent que déstabiliser un régime politique faible.
Quelques mois plus tard (brumaire an IV), un code des délits et des peines est promulgué dont un article dispose que " la police judiciaire recherche les délits et les crimes…en rassemble les preuves et en livre les auteurs aux tribunaux ". Toutefois, cette naissance textuelle de la police judiciaire ne s'accompagne encore d'aucune concrétisation dans les faits.
Malgré quelques beaux succès, l'installation de commissaires de police dans toutes les villes de plus de 5.000 habitants en septembre 1796 n'empêche pas la criminalité de galoper, ni les coups d'Etat de se tenter.
Les ministres de la police générale se succèdent (neuf en trois ans et demi) jusqu'à la nomination de Fouché, ancien député de la Convention, en juillet 1799. Après le coup d'état du 18 brumaire an VIII qu'il a favorisé, il donne une impulsion nouvelle à l'institution policière.
LA POLICE IMPERIALE (1799 - 1815).
Dès sa prise de pouvoir, Bonaparte s'attache à réformer l'Etat. La loi du 28 pluviôse an VIII (17 février 1800) refond les structures étatiques.
· A Paris, siège de tous les coups d'Etat et révolutions, il met en place une puissante préfecture de police, héritière de la lieutenance de police. Le préfet de police a en charge la police criminelle de droit commun, la police administrative et la police de renseignement. Son principal objectif est d'étouffer toute velléité de rébellion contre le pouvoir central.
· En province, dans toutes les villes de plus de 5.000 habitants, un commissaire de police est nommé par le gouvernement et placé sous l'autorité du préfet ou du sous-préfet. Au delà de 10.000 habitants, un commissaire de police supplémentaire est affecté par tranche de 10.000. Au delà de 100.000 habitants et dans quelques villes stratégiques n'atteignant pas ce seuil, un commissaire général est désigné.
· En milieu rural et dans les villes de moins de 5 000 habitants, les pouvoirs de police sont exercés par la gendarmerie nationale et les gardes-champêtres.
Mis en place sous le Consulat, ce système s'étend aux territoires conquis durant l'Empire.
La méthode de Fouché, qui restera à ce poste jusqu'à sa disgrâce en 1810, s'appuie sur le quadrillage administratif très serré qu'autorise la nouvelle organisation. Le recours à des indicateurs rémunérés et la pratique du " cabinet noir " entraînent un afflux très important de renseignements. Les fichiers font leur apparition. Un bulletin quotidien est rédigé à l'attention de l'empereur.
Menée avec un maximum d'efficacité et un minimum de violence, la méthode produit des résultats remarquables. La criminalité chute pour atteindre un niveau jamais atteint ; il est vrai que dans le même temps, les guerres incessantes entraînent loin du pays des jeunes gens en âge de commettre des infractions.
En 1811, des directeurs généraux peuvent être nommés au-dessus des commissaires généraux.
LA RESTAURATION MONARCHIQUE (1815).
En réaction à l'Empire centralisateur, la Restauration revient à un système de décentralisation proche de celui des révolutionnaires, en plaçant les structures policières sous l'autorité des municipalités. Le ministère de la police générale est alors réduit au rang d'une simple direction du ministère de l'intérieur (1818).
Seule Paris, capitale où l'esprit révolutionnaire demeure, conserve sa préfecture de police, alors employée comme police politique. Le préfet de police rend directement compte au roi, nomme et révoque les commissaires de police selon son bon vouloir. Des inspecteurs en civils sont recrutés de la même façon et rapidement surnommés les " en-bourgeois ", dont l'inspecteur Javert, décrit par Victor Hugo dans Les misérables, est l'archétype.
LA PREMIERE POLICE EN UNIFORME DU MONDE (1829).
La criminalité se développe, favorisée par une situation économique et sociale qui ne s'améliore pas.
En 1829 (loi du 12 mars), les sergents de Paris sont institués. Portant tricorne et épée, ils sont chargés de veiller à la paix publique et constituent la première force de police en uniforme du monde. Ces sergents de ville, dont les plus méritants peuvent être promus brigadier (grade créé en 1830) sont placés sous les ordres d'officiers de paix qui répondent eux-mêmes à ceux d'un commissaire appelé chef de la police municipale à Paris. Ce système est mis en place dans les grandes villes du royaume et perdurera sous Louis-Philippe après la révolution de juillet.
DECLIN DES POLICES MUNICIPALES (1848 - 1884).
L'euphorie, qui accueille l'abdication de Louis-Philippe le 24 février 1848, laisse la place à l'insurrection puis à la révolution. Le 15 mai, un coup d'Etat est tenté. Du 23 au 26 juin, des manifestations de chômeurs tournent à l'émeute (plus de 5.500 morts).
Louis-Napoléon Bonaparte est élu président de la République au suffrage universel le 10 décembre 1848.
Une ordonnance du 8 avril 1849 rétablit les sergents de ville, dissous après la chute de Louis-Philippe en raison de leur action contre les journaux d'opposition.
En 1851, une préfecture de police est créée à Lyon sur le modèle parisien.
Le coup d'Etat du 2 décembre 1851 et l'avènement du second Empire s'accompagnent d'un renforcement des pouvoirs des préfets de police. Celui de Paris prend le contrôle d'un ministère de la police générale éphémèrement recréé, qui redevient très vite une simple direction du ministère de l'intérieur.
En 1853, les banlieues de Paris et de Lyon passent sous l'autorité des préfets de police.
Le dispositif est jugé satisfaisant et, en 1855 (loi du 5 mai), toutes les villes de plus de 40 000 habitants voient la création d'une préfecture de police. Dans le même temps, les maires de ces villes sont nommés par le gouvernement et non plus élus.
Créée en 1846, la police des trains devient police spéciale des chemins de fer (décret du 22 février 1855) placée sous l'autorité du chef de la sûreté générale.
Par arrêté du préfet de police du 7 septembre 1870, les sergents de ville changent de nom ; ils deviennent des gardiens de la Paix publique. Leur uniforme est modifié, le bicorne est remplacé par le képi. En 1871, Jules Ferry met à disposition de la préfecture de police la caserne de la Cité pour en faire son siège. Cette caserne ayant été bâtie sur l'emplacement de l'ancien marché aux volailles de Paris le sobriquet de poulet est alors donné aux policiers.
La POLICE DE LA TROISIEME REPUBLIQUE (1884).
Les travaux des parlementaires de la nouvelle république aboutissent à la loi du 6 avril 1884 qui a pour but de concilier l'idéal républicain avec la nécessité de maintenir un ordre public souvent mis à mal. Elle répartit les pouvoirs de police entre les maires et les préfets selon le nombre d'habitants (Paris n'est pas concernée par ce texte) :
< 5.000 hab. : Le maire exerce la police et dispose d'un ou plusieurs gardes-champêtres qu'il recrute librement. Pour les affaires d'importance, il peut recourir à la gendarmerie nationale.
5 à 40.000 hab. : Le commissaire de police, sous les ordres du maire mais nommé et géré par la direction de la sûreté générale du ministère de l'Intérieur, dirige la police municipale qui " a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté et la salubrité publique ". Le préfet exerce des contrôles, se substitue aux autorités municipales négligentes, agrée les personnels de la police municipale et a seul le pouvoir de les révoquer.
> 40.000 hab. La police municipale est organisée par décret du président de la République, pris sur proposition du ministre de l'Intérieur conseillé par le préfet.
Cette organisation des services de sécurité publique ne subit que peu d'évolution jusqu'à la seconde guerre mondiale.
Alphonse Bertillon 1853 - 1914 |
Edmond Locard 1877 - 1966 |
LA NAISSANCE DE LA POLICE TECHNIQUE (Alphonse Bertillon) ET SCIENTIFIQUE (Edmond Locard)
A côté de cette réforme structurelle, la police bénéficie des progrès de la technologie.
En 1882, la préfecture de police se dote d'un service d'anthropométrie, puis d'un service photographique. Son chef depuis 1888, Alphonse Bertillon, est nommé chef du service de l'identité judiciaire le 16 août 1893. Il introduit la méthode de signalisation anthropométrique des individus arrêtés (système copié dans le monde entier), puis se convertit à la dactyloscopie (observation des empreintes digitales) et invente la dactylotechnie (prélèvement et comparaison des empreintes).
En 1902, un criminel est pour la première fois confondu par ce procédé et la préfecture de police se dote d'un service dactyloscopique (1903).
En matière de police scientifique, le Professeur Edmond Locard ouvre le premier laboratoire de police scientifique à Lyon en 1910, selon le principe qu'il a établi : "nul individu ne peut séjourner en un point sans y laisser la marque de son passage, surtout lorsqu'il a dû agir avec l'intensité que suppose l'action criminelle". Les autres laboratoires de police scientifique ouvrent progressivement leurs portes entre les deux guerres.
LA PREMIERE ECOLE DE POLICE DU MONDE.
Le 30 juillet 1883, une école pratique de la police municipale ouvre ses portes au sein de la caserne de la Cité, siège de la préfecture de police. Cette école est destinée à former aux spécificités de leur métier les futurs gardiens de la paix dont beaucoup sont d'anciens militaires.
En 1914, renommée école pratique et professionnelle de la police municipale, elle permet aux gradés de police de recevoir une formation complémentaire. Un film pédagogique intitulé :Ce que doit être son attitude et ce qu'elle ne doit pas être est en particulier utilisé.
En 1922, une coopération avec le milieu universitaire prend forme avec la création de l'Institut de Criminologie de Paris.
LES BRIGADES DU TIGRE.
Les progrès technologiques et pédagogiques ne suffisent pas pour lutter efficacement contre de nouvelles formes de criminalité (attentats anarchistes, retour des bandits de grands chemins, jeunes délinquants marginaux, dits apaches, agressant les bourgeois, etc.…). Les juges d'instruction, qui diligentent alors seuls toutes les enquêtes au delà des délais de flagrance, sont débordés et contraints à déléguer enfin à la police des actes d'instruction, comme prévu dans le code de Brumaire repris dans le code d'instruction criminelle de 1808.
Le besoin d'une police judiciaire conduit le président du Conseil et ministre de l'intérieur Georges Clémenceau à créer des services chargés de " seconder l'autorité judiciaire dans les recherches et la répression des crimes et délits de droit commun ".
Le 30 décembre 1907, naissent donc douze brigades régionales de police mobile, chacune placée sous l'autorité d'un commissaire divisionnaire assisté de trois commissaires de police et dix inspecteurs. Tous officiers de police judiciaire, ils sont rattachés à la sûreté générale du ministère de l'intérieur, érigée en service autonome depuis 1887.
L'efficacité de ces brigades mobiles fait leur gloire. Elles sont très vite surnommées les brigades du tigre, surnom politique de Clémenceau en raison de sa ténacité.
Ces brigades font immédiatement appel aux techniques de police scientifique (dactyloscopie, analyses toxicologiques, balistique, etc.).
En 1913, une treizième brigade mobile est créée à Paris.
LA FIN DES POLICES MUNICIPALES.
Plusieurs villes connaissent une étatisation de leur police municipale, sous l'autorité des préfets de département, tantôt en raison d'une administration insuffisante (Marseille en 1908, Toulon en 1918, Nice en 1920) ou pour les besoins de la gestion de l'ordre public et de la sécurité (Strasbourg, Mulhouse et Metz en 1925, région parisienne en 1935).
Par ailleurs, les créations successives de structures nouvelles imposent une réorganisation des services.
Par les décrets-lois de 1934 et 1935, la sûreté générale est réorganisée en sûreté nationale, qui comprend dorénavant l'ensemble des services de police de France, à l'exception de la préfecture de police de Paris qui conserve un statut particulier : police municipale d'une ville qui n'a pas de maire, elle est dirigée par un préfet ; ce qui s'explique par la crainte politique des révolutions qui se font souvent dans la capitale comme tend à le confirme la journée insurrectionnelle du 6 février 1934 (17 morts, 770 blessés).
La police spéciale devient service des renseignements généraux (1937, Front populaire).
Ces réformes ne suffisent pas à corriger la multiplicité des commandements, l'absence de coordination, la diversité des personnels, la disparité des statuts et des rémunérations, l'inégalités des budgets municipaux.
La seconde guerre mondiale survient en plein débat en faveur d'une police d'Etat.
L'ETAT FRANCAIS (1941).
Pour asseoir son autorité, le gouvernement du maréchal Pétain pratique une épuration massive des cadres (plus de 50% des préfets et des commissaires sont révoqués) et une réforme profonde des structures de police : la police nationale est créée et dirigée par un secrétaire général pour la police, chef d'une direction générale de la police nationale.
Par la loi du 23 avril 1941, la police nationale est instituée dans toutes les communes de plus de 10 000 habitants, et dans les communes plus petites désignées par arrêté du ministre de l'Intérieur. Paris conserve son statut particulier.
La police nationale s'organise au niveau régional, où un préfet est chargé de la police, assisté d'un intendant de police et des services régionaux de police. Chaque département comprend un district de police, dirigé par un commissaire chef de district, subdivisé en circonscriptions de police dirigées par un commissaire central ou un commissaire de police selon l'importance.
Un statut de la fonction publique policière est élaboré.
Il prévoit le recrutement par concours pour le plus grand nombre, et sur titres pour certaines fonctions. Les carrières sont gérées par le ministre de l'Intérieur pour les cadres supérieurs, le préfet pour les autres. L'avancement se fait au choix.
La formation professionnelle est organisée à l'échelon national avec l'ouverture de l'école nationale de police de Saint-Cyr-au-Mont-d'Or.
Tous les personnels des polices municipales sont intégrés dans la nouvelle police nationale.
VERS UNE POLICE D'ETAT (1944).
A la Libération, l'ordonnance du 16 novembre 1944 rétablit la direction générale de la sûreté nationale. Rattachée au ministère de l'intérieur, elle comprend quatre grandes directions actives : police judiciaire, sécurité publique, renseignements généraux et surveillance du territoire, ainsi que des directions administratives : personnel et administration, matériel, étrangers.
Au sein de la direction de la sécurité publique, une sous-direction des compagnies républicaines de sécurité est créée, qui sera érigée en réserve générale de la police nationale après les grands mouvements de grève de 1947.
Le principe est conservé d'une police d'Etat dans les villes de plus de 10 000 habitants.La préfecture de police de Paris, dont les personnels sont qualifiés " d'homologues " de ceux de la sûreté nationale, ne relève pas de cette nouvelle direction générale.
Quelques réformes interviennent ensuite :
- en 1954, les inspecteurs de police sont renommés " officiers de police " ;
- en 1961, le service central de coopération international est fondé dans le but de former les polices des pays de l'Afrique francophone.
LA POLICE NATIONALE (1966).
La loi du 9 juillet 1966 institue la police nationale, qui rassemble les personnels de la sûreté nationale et de la préfecture de police de Paris.
Tandis qu'une direction générale de la police nationale est créée au sein du ministère de l'intérieur, le préfet de police de Paris demeure le chef des services de police et l'intermédiaire obligé pour l'exercice de la sécurité.
Tous les personnels deviennent fonctionnaires et sont répartis en cinq corps :
- Commissaires de police
- Police en tenue d'uniforme - Police en tenue civile
- Officiers de paix - Officiers de police
- Gradés et gardiens de la paix - Enquêteurs de police
- Personnel administratif, technique et scientifique
En 1973, les missions de police aériennes et de surveillance des migrations transfrontières croissent et justifient qu'elles soient détachées des attributions des renseignements généraux pour constituer le service central de la police de l'air et des frontières.
DES FEMMES POLICIER
En 1966, quelques femmes sont intégrées aux services actifs par la voie du concours d'officier de police.
Recrutées, dans un premier temps, pour des missions liées à la protection de l'enfance, elle voient cette restriction disparaître avec l'accès à tous les postes ouverts au concours d'inspecteur de police (anciennement officier de police) en 1972, de commissaire de police en 1974, de gardien de la paix en 1978 et d'officier de paix en 1982.
LA MODERNISATION DE LA POLICE NATIONALE
Ces dernières décennies sont marquées pour la police nationale par un important effort de modernisation qui se manifeste notamment par :
- · la création de nouvelles structures spécialisées : les G.I.P.N., groupes d'intervention de la police nationale, et le R.A.I.D., unité opérationnelle spécialisée dans la recherche, l'assistance, l'intervention et la dissuasion ; les offices centraux, pour les investigations dans des domaines particuliers, notamment la grande délinquance ;
- Une professionnalisation de la formation : création de la direction de la formation de la police nationale en 1999 ;
- Les progrès de la police technique et scientifique ;
- La généralisation de l'utilisation des technologies de l'informatique et de la communication ;
- Le développement des parcs de matériels : véhicules, équipements…
- Une gestion plus adaptée des personnels qui se traduit par :
- La diversification des recrutements (policiers auxiliaires en 1986, adjoints de sécurité en 1997) ;
- La réforme des corps et carrières, déjà marquée en 1995 par la refonte des corps (unification des gradés et gardiens de la paix et des enquêteurs de police dans le corps de maîtrise et d'application ; réunion des inspecteurs de police et des officiers de paix dans le corps de commandement et d'encadrement ; création du corps de conception et de direction rassemblant les commissaires de police) ;
- La recherche actuellement engagée d'une meilleure répartition des responsabilités et un pyramidage des corps plus approprié à un management moderne.
- La participation de la police nationale au défilé du 14 juillet depuis 1996 constitue le symbole de la reconnaissance de la nation.