Dans le silence de la nuit alors que s’évanouit
L’éveil des hommes derrière leurs paupières,
La forêt s’écrie : « Je suis la puissance
Que le soleil a fait jaillir du cœur de la terre. »
Cependant la mer reste calme,
Disant en son cœur : « La puissance est à moi. »
Dit le rocher : « Le destin m’a érigé
En édifice jusqu’au jour du Jugement dernier. »
Cependant la mer reste quiète,
Disant en son cœur : « L’édifice est à moi. »
Dit le vent : « Comme je suis étrange,
Séparant le ciel de la brume. »
Cependant la mer demeure calme,
Disant en son cœur : « Le vent est à moi. »
Dit le fleuve : « Comme je suis pur,
Étanchant la soif de la terre. »
Cependant la mer demeure quiète,
Disant en son cœur : « Le fleuve est à moi. »
Dit le mont : « Je resterai élevé
Tant que perdureront les étoiles au sein de l’univers. »
Cependant la mer reste calme,
Disant en son cœur : « Le mont est à moi. »
Dit la pensée : « Je suis la reine,
Et il n’est d’autre reine au monde que moi. »
Cependant la mer demeure assoupie,
Disant dans son sommeil : « Tout est à moi. »
(Khalil Gibran, Merveilles et curiosités, 1923)
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