Caricature de Salim Zerrouki |
Chaque jour, oui chaque jour, des militants sont convoquĂ©s par les services de sĂ©curitĂ©.D’autres sont interpellĂ©s. InterrogĂ©s, frappĂ©s, insultĂ©s, humiliĂ©s, ils sont ensuite dĂ©fĂ©rĂ©s devant les tribunaux qui les placent en dĂ©tention sans aucune pitiĂ© et sans respecter le moindre article de la Constitution algĂ©rienne.
Prenons quelques exemples. Ă AĂŻn TĂ©mouchent, un jeune appelĂ© Mohamed Latreche a Ă©tĂ© convoquĂ© dimanche [3 mai] par les services de sĂ©curitĂ© pour une enquĂȘte Ă propos d’une caricature sur le prĂ©sident Abdelmadjid Tebboune qu’il avait publiĂ©e sur Facebook !
Caricature de Salim Zerrouki |
Une liste interminable Ă laquelle les avocats volontaires et valeureux du CNLD ajoutent chaque jour de nouveaux noms. Il s’agit de ces nouveaux militants, internautes, incarcĂ©rĂ©s au nom de l’arbitraire et suivant des accusations totalement farfelues comme “outrage au prĂ©sident de la RĂ©publique” ou “atteinte Ă l’unitĂ© nationale”.
Arrestations arbitraires
Ce qui s’instaure en AlgĂ©rie brise des familles, fait pleurer des mĂšres laissĂ©es orphelines par leurs enfants partis se sacrifier dans les prisons algĂ©riennes avec l’espoir que leur combat en faveur de la dĂ©mocratie en AlgĂ©rie aboutira.
Depuis deux jours, toute la Toile algĂ©rienne est Ă©mue et bouleversĂ©e par les images de la maman de Malik Riahi [un manifestant] et les larmes qu’elle a versĂ©es devant le portail du tribunal de AĂŻn TĂ©mouchent, oĂč son fils a Ă©tĂ© condamnĂ© Ă dix-huit mois de prison ferme pour une vidĂ©o et des publications sur Facebook.
Malik Riahi savait pertinemment qu’il allait ĂȘtre incarcĂ©rĂ© Ă la suite de sa convocation judiciaire. Il n’avait pas fui, il ne s’est pas Ă©vadĂ©. Il a prĂ©fĂ©rĂ© affronter la bĂȘte immonde. Avant de partir en prison, il avait “lĂ©guĂ©” aux AlgĂ©riens une vidĂ©o sur les rĂ©seaux sociaux oĂč il demande Ă ses camarades de prendre soin de sa “maman”.
Accaparer tous les pouvoirs
Combien de mamans ont versé des larmes pour leurs fils sacrifiés par le régime algérien ? Combien de mamans se sont lancées dans des cantiques pour maudire ces juges qui emprisonnent leurs enfants sur un simple coup de fil ?
L’AlgĂ©rie du 22 fĂ©vrier 2019 [date du dĂ©but du Hirak] ne s’est pas battue pour se retrouver dans une situation aussi dramatique. Oui, l’AlgĂ©rie de Bouteflika Ă©tait corrompue, mal gĂ©rĂ©e, frustrante et dĂ©sespĂ©rante. Mais celle d’aujourd’hui est bien pire : elle Ă©crase le faible, le fragile pour permettre au plus fort d’accaparer tous les pouvoirs.
Sous l’Ăšre Bouteflika, les AlgĂ©riens ne partaient pas aussi nombreux dans les prisons pour des caricatures dĂ©risoires sur Facebook, des publications ordinaires ou de simples commentaires critiques Ă l’Ă©gard du rĂ©gime. ReconnaĂźtre cette vĂ©ritĂ© est essentiel pour comprendre l’actuelle profondeur de la rĂ©gression politique de notre pays.
Les AlgĂ©riens et les AlgĂ©riennes ne vont pas se taire. Ils ne cĂ©deront pas Ă ces intimidations quotidiennes. Demain, lorsque la crise sanitaire du Covid-19 sera derriĂšre nous, les rues du pays vont s’embraser de nouveau. La dictature algĂ©rienne n’a donc pas encore gagnĂ© le match. L’arbitre n’a pas sifflĂ© la fin de la partie. C’est notre dernier espoir…
Par Abdou Semmar/Algérie Part
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