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illstration de Peter Newell |
À l’évidence, Nietzsche n’est pas un philosophe chez lequel les féministes aiment à puiser leur inspiration. Le thème de la femme est maintes fois abordé dans son œuvre, notamment dans son analyse de la tragédie, mais rarement sous un aspect purement politique, c’est-à-dire dans sa dimension sociale concrète, et dans son rapport aux hommes. Deux textes principaux sont néanmoins dédiés à l’analyse en particulier du rôle de la femme : le premier se trouve dans Ainsi parla Zarathoustra, et le second dans Par-delà le bien et le mal. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que Nietzsche n’est pas un défenseur de l’émancipation féminine.
Bien au contraire, derrière le combat pour l’égalité se cache selon lui l’avilissement pur et simple de la femme, qui, à grands renforts de cris et de revendications, lutte en vérité pour devenir tout aussi libre que son époux, et tout aussi asservie aux maîtres de ce dernier. Il pressent que le droit au travail si ardemment revendiqué ne fait qu’opérer un mouvement de transition pour remplacer la domination du mari par celle de la société –autrement dit, de l’argent. En effet, même si Nietzsche ne traite pas directement de la nouvelle aliénation représentée par le salariat, il affirme que « partout où l’esprit industriel a remporté la victoire sur l’esprit militaire et aristocratique, la femme tend à l’indépendance économique et légale d’un commis. » D’autres relectures marxistes du féminisme iront plus loin, affirmant qu’on trouve dans cette transition la raison des faveurs dont put jouir le féminisme dans les cercles libéraux de la fin du XIXème siècle, et qui avaient pour unique intention celle de donner à la femme les armes pour sortir de son foyer et devenir enfin une force de travail et de consommation au même titre que son tyran de mari.
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Adam et Eve chassés du Paradis, fresque de Masaccio, vers 1424 |
La lecture de ces phrases peut faire passer Nietzsche pour misogyne. Il est difficile de démontrer le contraire, mais son peu d’estime de la femme ne s’apparente pas à une détestation empreinte de goujaterie. Pour lui, les hommes aussi sont limités et faibles. Une grande partie de son œuvre traite des conditions nécessaires à ce que l’humanité se dépasse pour qu’advienne le surhumain. Ecarter les femmes et leur importance dans la description de ce devenir n’aurait aucun sens.
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Friedrich Nietzsche, Lou-Andréas Salomé et Paul Rée, 1882 |
Osons abandonner un instant les convictions qui sont les nôtres, et qui semblent ancrées en profondeur, y compris chez les esprits les plus libres. Si l’on envisage le monde comme un combat, et le but de toute existence comme celui d’une conquête, celle du surhumain, qu’y a-t-il d’insupportable dans l’idée que la volonté des femmes se joigne à celle des hommes, pour la suivre, l’accompagner et l’aider à se réaliser ? Nietzsche, dans ce combat, ne voit que la victoire. Que celui qui y concourt soit le guerrier ou son serviteur n’a finalement pas d’importance pour quiconque trouve son bonheur dans la volonté de vaincre.
par
Super
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