#Histoire #ETYMOLOGIE_AMAZIGH #nordAfrique #Culture
Encore une fois assegas amugaz...presque 30 siĂšcle de celebration ! longue vie aux amazigh !
Sur l’Ă©tymologie du mot amazigh
Le terme « amazigh » n’est pas l’invention du colonialisme français comme le disent certains ‘intellectuels’1 arabes imbus des idĂ©es assimilatrices du panarabisme, mais il est bien l’appellation des habitants de l’Afrique du Nord depuis la nuit des temps. Ce terme figure dans les textes/inscriptions de l’Egypte pharaonique de la pĂ©riode de Ramsis III, sous forme de Macwc2, dans les textes grecques et latins de l’antiquitĂ© dans lesquels il apparaĂźt sous diverses formes :Mazyes (HĂ©catĂ©e-VIĂšme siĂšcle A.C.), Maxyes (HĂ©rodote-VĂšme siĂšcle A.C.), Mazax, Mazaces, Mazikes (v. Dictionnaire latin :956) et dans les textes arabes du Moyen Age, comme ceux Ă©crits par Ibn-Khaldoun. Il est actuellement le terme par lequel se dĂ©signent les locuteurs de tamazight dans plusieurs rĂ©gions de la BerbĂ©rie, comme Ă Sened (Tunisie), au Djebel Nefoussa (Libye), Ă Touat (AlgĂ©rie), au Moyen Atlas (Maroc), et au Sahara (AlgĂ©rie, Mali, Niger).
Plusieurs hypothĂšses ont Ă©tĂ© dĂ©jĂ formulĂ©es au sujet de l’ethnonyme «amazigh», mais toutes, nous semble-t-il, sont dĂ©pourvues d’arguments convaincants, Ă l’exception d’une seule qui mĂ©rite d’ĂȘtre mentionnĂ©e ici et mĂȘme d’ĂȘtre soutenue par nos propres arguments : c’est celle avancĂ©e par F. Nicolas en 1950 et reprise par K. Prasse en 1972 et par S. Chaker en 1991.
Selon ces auteurs, « amaziÎł / amajeÎł » serait issu du verbe berbĂšre « jjeÎł » qui signifie dans le parler du Sud AlgĂ©rien, d’Iwelmiden, « marcher d’un pas altier / noble ». Cependant, comme l’a dĂ©jĂ expliquĂ© S. Chaker (v. Chaker, 1996 :131), il est exclu qu’un nom d’agent de structure aMaCiC/ aMaCeC soit dĂ©rivĂ© d’un verbe Ă initiale tendue, car ce genre de verbes donnent normalement des noms d’agent de structure aMaCCaC, e.g. : « áčáčes amaáčáčas (K.) » . Il faut alors chercher un lexĂšme verbal dont l’initiale est non-tendue. Le lexĂšme en question est bel et bien celui mentionnĂ© par Chaker, Ă savoir «jeÎłeÎł »3 qui signifie « ĂȘtre brave / intrĂ©pide » (v. Alojali,1980 :83) ; c’est en fait lui qui, par assimilation progressive, a donnĂ© la variante « jjeÎł » .
Ă premiĂšre vue, le rattachement de «amaziÎł / amajeÎł » au verbe « jeÎłeÎł » parait ne pas convenir, car ce lexĂšme-ci donnera plutĂŽt «amajeÎłeÎł » qui n’est attestĂ© dans aucun parler amazigh actuel. Cependant, nous sommes quasiment certains que c’est Ă partir de ce nom d’agent synchroniquement anormal que s’est dĂ©veloppĂ© l’ethnonyme en question. Notre hypothĂšse est fondĂ©e sur un phĂ©nomĂšne trĂšs courant en amazigh : l’apocope. L’apocope, qui affecte les radicales dites faibles (v. Taifi, in Awal, 1990 :228), consiste en la chute d’un ou plusieurs phonĂšmes Ă la finale d’un mot. Ce phĂ©nomĂšne est attestĂ© dans beaucoup de paires comme : « ážfut / taážfi ; iÎłzif / teÎłzi ; tukeráža / aker » ; etc.
« AmajeÎłeÎł » serait donc la forme primitive ;
Donc, en guise de rĂ©capitulation, nous avons la sĂ©rie dĂ©rivationnelle suivante: «jeÎłeÎł (jjeÎł) amajeÎłeÎł/ amajeÎł (amaçeÎł, amaheÎł, amaziÎł) ». Notez que cette sĂ©rie est ordonnĂ©e en commençant par la forme supposĂ©e la plus primitive Ă la moins primitive.
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1 Je me rappelle avoir lu dans un journal de la presse nationale, juste aprĂšs l’ouverture du paysage mĂ©diatique qui a suivi les Ă©vĂ©nements d’octobre 89, un article signĂ© par un obscur docteur nommĂ© Abdelkrime El-DjazaĂŻri, dans lequel l’auteur considĂšre le mot « amazigh » comme Ă©tant une fabrication des Français qui tentaient alors Ă diviser le peuple algĂ©rien. (les mĂȘmes idĂ©es ont depuis Ă©tĂ© publiĂ©es, dans certains titres connus pour leur animositĂ© pour tamazight, par un autre docteur encore plus obscur, en l’occurrence Othmane Saadi).
2 Etant donnĂ© que le systĂšme phonologique de l’ancien Ă©gyptien est dĂ©pourvu des phonĂšmes /z, Îł/, ceux-ci ont Ă©tĂ© donc remplacĂ©s par leurs proches correspondants / c, x / puis / c, c / ; quant Ă la lettre « w » utilisĂ©e aussi pour transcrire les voyelles / u, o /, elle correspondrait Ă la voyelle berbĂšre / É / qui s’approche de /o/ surtout au contact avec les vĂ©laires. ‘Macwc’ se prononcerait donc [macÉc] trĂšs proche du touareg « AmaceÎł ».
3 La racine JÎ est attestĂ©e dans le parler amazigh de Takerboust dans « ajaÎłiÎł », le geai, peut-ĂȘtre ainsi nommĂ© pour sa noblesse ou son intrĂ©piditĂ© par opposition Ă certains oiseaux moins attirants ou craintifs. La variante de cette racine est ZX Ă©galement attestĂ©e dans le mĂȘme parler dans le verbe «zux », se pavaner, d’oĂč le substantif «azuxzux », le dindon, trĂšs connu pour sa dĂ©marche ostentatoire.
Par : Djaafar Messaoudi
Encore une fois assegas amugaz...presque 30 siĂšcle de celebration ! longue vie aux amazigh !
Sur l’Ă©tymologie du mot amazigh
Le terme « amazigh » n’est pas l’invention du colonialisme français comme le disent certains ‘intellectuels’1 arabes imbus des idĂ©es assimilatrices du panarabisme, mais il est bien l’appellation des habitants de l’Afrique du Nord depuis la nuit des temps. Ce terme figure dans les textes/inscriptions de l’Egypte pharaonique de la pĂ©riode de Ramsis III, sous forme de Macwc2, dans les textes grecques et latins de l’antiquitĂ© dans lesquels il apparaĂźt sous diverses formes :Mazyes (HĂ©catĂ©e-VIĂšme siĂšcle A.C.), Maxyes (HĂ©rodote-VĂšme siĂšcle A.C.), Mazax, Mazaces, Mazikes (v. Dictionnaire latin :956) et dans les textes arabes du Moyen Age, comme ceux Ă©crits par Ibn-Khaldoun. Il est actuellement le terme par lequel se dĂ©signent les locuteurs de tamazight dans plusieurs rĂ©gions de la BerbĂ©rie, comme Ă Sened (Tunisie), au Djebel Nefoussa (Libye), Ă Touat (AlgĂ©rie), au Moyen Atlas (Maroc), et au Sahara (AlgĂ©rie, Mali, Niger).
Plusieurs hypothĂšses ont Ă©tĂ© dĂ©jĂ formulĂ©es au sujet de l’ethnonyme «amazigh», mais toutes, nous semble-t-il, sont dĂ©pourvues d’arguments convaincants, Ă l’exception d’une seule qui mĂ©rite d’ĂȘtre mentionnĂ©e ici et mĂȘme d’ĂȘtre soutenue par nos propres arguments : c’est celle avancĂ©e par F. Nicolas en 1950 et reprise par K. Prasse en 1972 et par S. Chaker en 1991.
Selon ces auteurs, « amaziÎł / amajeÎł » serait issu du verbe berbĂšre « jjeÎł » qui signifie dans le parler du Sud AlgĂ©rien, d’Iwelmiden, « marcher d’un pas altier / noble ». Cependant, comme l’a dĂ©jĂ expliquĂ© S. Chaker (v. Chaker, 1996 :131), il est exclu qu’un nom d’agent de structure aMaCiC/ aMaCeC soit dĂ©rivĂ© d’un verbe Ă initiale tendue, car ce genre de verbes donnent normalement des noms d’agent de structure aMaCCaC, e.g. : « áčáčes amaáčáčas (K.) » . Il faut alors chercher un lexĂšme verbal dont l’initiale est non-tendue. Le lexĂšme en question est bel et bien celui mentionnĂ© par Chaker, Ă savoir «jeÎłeÎł »3 qui signifie « ĂȘtre brave / intrĂ©pide » (v. Alojali,1980 :83) ; c’est en fait lui qui, par assimilation progressive, a donnĂ© la variante « jjeÎł » .
Ă premiĂšre vue, le rattachement de «amaziÎł / amajeÎł » au verbe « jeÎłeÎł » parait ne pas convenir, car ce lexĂšme-ci donnera plutĂŽt «amajeÎłeÎł » qui n’est attestĂ© dans aucun parler amazigh actuel. Cependant, nous sommes quasiment certains que c’est Ă partir de ce nom d’agent synchroniquement anormal que s’est dĂ©veloppĂ© l’ethnonyme en question. Notre hypothĂšse est fondĂ©e sur un phĂ©nomĂšne trĂšs courant en amazigh : l’apocope. L’apocope, qui affecte les radicales dites faibles (v. Taifi, in Awal, 1990 :228), consiste en la chute d’un ou plusieurs phonĂšmes Ă la finale d’un mot. Ce phĂ©nomĂšne est attestĂ© dans beaucoup de paires comme : « ážfut / taážfi ; iÎłzif / teÎłzi ; tukeráža / aker » ; etc.
« AmajeÎłeÎł » serait donc la forme primitive ;
Donc, en guise de rĂ©capitulation, nous avons la sĂ©rie dĂ©rivationnelle suivante: «jeÎłeÎł (jjeÎł) amajeÎłeÎł/ amajeÎł (amaçeÎł, amaheÎł, amaziÎł) ». Notez que cette sĂ©rie est ordonnĂ©e en commençant par la forme supposĂ©e la plus primitive Ă la moins primitive.
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1 Je me rappelle avoir lu dans un journal de la presse nationale, juste aprĂšs l’ouverture du paysage mĂ©diatique qui a suivi les Ă©vĂ©nements d’octobre 89, un article signĂ© par un obscur docteur nommĂ© Abdelkrime El-DjazaĂŻri, dans lequel l’auteur considĂšre le mot « amazigh » comme Ă©tant une fabrication des Français qui tentaient alors Ă diviser le peuple algĂ©rien. (les mĂȘmes idĂ©es ont depuis Ă©tĂ© publiĂ©es, dans certains titres connus pour leur animositĂ© pour tamazight, par un autre docteur encore plus obscur, en l’occurrence Othmane Saadi).
2 Etant donnĂ© que le systĂšme phonologique de l’ancien Ă©gyptien est dĂ©pourvu des phonĂšmes /z, Îł/, ceux-ci ont Ă©tĂ© donc remplacĂ©s par leurs proches correspondants / c, x / puis / c, c / ; quant Ă la lettre « w » utilisĂ©e aussi pour transcrire les voyelles / u, o /, elle correspondrait Ă la voyelle berbĂšre / É / qui s’approche de /o/ surtout au contact avec les vĂ©laires. ‘Macwc’ se prononcerait donc [macÉc] trĂšs proche du touareg « AmaceÎł ».
3 La racine JÎ est attestĂ©e dans le parler amazigh de Takerboust dans « ajaÎłiÎł », le geai, peut-ĂȘtre ainsi nommĂ© pour sa noblesse ou son intrĂ©piditĂ© par opposition Ă certains oiseaux moins attirants ou craintifs. La variante de cette racine est ZX Ă©galement attestĂ©e dans le mĂȘme parler dans le verbe «zux », se pavaner, d’oĂč le substantif «azuxzux », le dindon, trĂšs connu pour sa dĂ©marche ostentatoire.
Par : Djaafar Messaoudi