La chirurgie mammaire est aujourd'hui une spécialité hautement développée, mais son histoire remonte à plusieurs siècles. Au XVIIe siècle, dans l'Europe du Saint-Empire, des interventions comme la mastectomie étaient déjà pratiquées, bien que dans des conditions rudimentaires et souvent risquées. L'un des témoignages les plus fascinants de cette période se trouve dans l'"Arzneibuch", un manuscrit datant d'environ 1675 et conservé à la Wellcome Library de Londres. Cet ouvrage, rédigé pour un ordre religieux franciscain, décrit avec précision les étapes d'une mastectomie et le protocole suivis pour traiter les tumeurs mammaires.
Une intervention médicale risquée mais pratiquée
Malgré l'absence de connaissances modernes sur l'asepsie et l'anesthésie, la chirurgie mammaire était déjà pratiquée pour traiter certaines pathologies graves, notamment les tumeurs et la nécrose tissulaire. Le texte de l'"Arzneibuch" fournit des détails précis sur les préparations et les instruments utilisés lors de ces interventions.
Avant l'opération, le patient recevait un laxatif (laxiren) et un lavement (klystieren) afin de nettoyer le corps. La zone affectée était préparée avec des pansements et des cataplasmes (Pflastere und Salben), tandis que des agents hémostatiques (Blutstellung) étaient préparés pour contrôler les saignements.
Les instruments et la technique chirurgicale
L'intervention chirurgicale impliquait l'usage de plusieurs outils rudimentaires :
- Couteaux (Messer) et ciseaux (Scheren) pour réaliser les incisions.
- Crochets ou écarteurs (Haken ou Retraktoren) pour exposer les tissus.
- Fers à cautère (Brenneisen) afin de coaguler les vaisseaux sanguins et limiter les hémorragies.
- Poudres (Puder) et compresses (Pauschen) pour traiter et panser la plaie.
Le patient était attaché (den Patienten binden) afin d'éviter les mouvements brusques. Une fois la tumeur ou le tissu malade retiré, les mesures hémostatiques étaient appliquées pour stopper le saignement (das Bludt zu stollen), et la plaie était recouverte d'une compresse propre (gute Blüessoli). Elle était ensuite laissée sans bandage pendant 24 heures (24 Stund ohne Verbudten).
Un savoir chirurgical d'origine monastique
L'aspect le plus surprenant de cette description est qu'elle provient d'un ouvrage médical rédigé pour une communauté religieuse. Les monastères étaient alors des centres de savoir médical et chirurgical, où les religieux, souvent formés à la pratique médicale, soignaient les membres de leur ordre ainsi que les populations locales.
Cet Arzneibuch constitue un témoignage inestimable sur les pratiques médicales du XVIIe siècle. Il montre comment, bien avant les progrès de la médecine moderne, la chirurgie mammaire était déjà une réalité, bien que marquée par des risques élevés et des moyens limités. Ce document révèle également l'implication des ordres religieux dans la transmission des savoirs médicaux et la prise en charge de la santé féminine à une époque où la chirurgie était encore un domaine en pleine évolution.