Critique:
"Le Cheval de Turin" de Béla Tarr est une œuvre magistrale qui transcende les conventions cinématographiques pour offrir une expérience méditative et profondément immersive. Le film, sorti en 2011, est le dernier long métrage du réalisateur hongrois et est souvent considéré comme son chef-d'œuvre.
Le film débute par une séquence saisissante d'un cheval luttant contre un vent violent, une image qui annonce le ton austère et apocalyptique de l'œuvre. Le récit suit les derniers jours d'un père, Ohlsdorfer, et de sa fille, vivant dans une ferme isolée et désolée. Leur routine quotidienne est minutieusement documentée, de l'habillage à la préparation des repas, créant un rythme hypnotique qui plonge le spectateur dans leur existence monotone et désespérée.
L'usage du noir et blanc par Tarr renforce l'atmosphère sombre et oppressante du film. Chaque plan est soigneusement composé, utilisant la lumière et l'ombre pour créer des images d'une beauté troublante. Les longues prises caractéristiques du réalisateur permettent au spectateur de s'immerger pleinement dans l'environnement du film, accentuant la sensation de temps qui s'étire interminablement.
La bande sonore, composée par Mihály Víg, ajoute une dimension supplémentaire à l'expérience cinématographique. Les mélodies répétitives et mélancoliques accompagnent parfaitement les images, renforçant l'ambiance de désolation et de fatalité.
Le thème central du film, inspiré par la légende de Friedrich Nietzsche et du cheval de Turin, explore la dégradation physique et spirituelle des personnages, ainsi que la lutte contre une force inévitable et implacable. Le cheval, symbole de cette lutte, devient un miroir de la condition humaine face à l'inéluctabilité de la mort et de la décomposition.
"Le Cheval de Turin" n'est pas un film facile à regarder; il exige patience et introspection de la part du spectateur. Cependant, pour ceux prêts à s'engager dans cette expérience unique, le film offre une réflexion profonde sur la condition humaine, la résilience et l'absurdité de la vie face à l'entropie.
En somme, "Le Cheval de Turin" est une œuvre cinématographique d'une rare intensité et beauté, marquant la fin de la carrière de Béla Tarr sur une note magistrale. C'est un film qui continue de résonner longtemps après le visionnage, laissant une empreinte indélébile dans l'esprit du spectateur.