L’UNIVERS EST-IL INFINI ?
C’est un peu la question des questions !
Source : -Chronique des atomes et des galaxie- Hubert Reeves.
On va dire qu’il est parti du Big Bang, point zĂ©ro, naissance de l’espace et du temps, sans qu’on sache trop ce qu’il y avait avant : Ă©nergies quantiques ? Et encore avant : terra incognita ! C’est dire…
Au Moyen Ăge, selon la thĂ©ologie de saint Thomas d’Aquin -la rĂ©fĂ©rence du monde chrĂ©tien-, seul Dieu est infini et, en consĂ©quence, l’Univers, crĂ©ation de Dieu, ne peut l’ĂȘtre. A-t-on dĂ©jĂ vu, en effet, crĂ©ation supĂ©rieure Ă son crĂ©ateur ? Cependant, certains penseurs avaient des idĂ©es diffĂ©rentes. Le 17 fĂ©vrier 1600, sur le Campo dei Fiori Ă Rome, Giordano Bruno fut brĂ»lĂ© pour avoir publiĂ© -De l’infini, de l’Univers et des mondes-. Inacceptable pour les autoritĂ©s religieuses de l’Ă©poque. Et lĂ -dessus, Bruno d’insister « Si votre Dieu n’a pas pu crĂ©er un monde infini, le mien l’a pu ». Horreur, horreur ! Au bĂ»cher !
Puis vint la querelle amusante entre claustrophobes et agoraphobes. Les premiers ne se sentent pas bien dans un espace confinĂ© (gardent de mauvais souvenirs des contraintes rĂ©centes). Au contraire, les agoraphobes se sentent mal dans des espaces trop ouverts. Ainsi, pour eux, l’idĂ©e de l’Univers infini est effrayante, inacceptable, pour ne pas dire absurde.
Mais face aux alĂ©as du cosmos, nos rĂ©actions affectives n’ont aucune importance scientifique !
Selon les découvertes de Hubble, les galaxies
s’Ă©loignent toutes les unes des autres, et plus elles sont distantes plus elles se fuient rapidement. Du coup, les galaxies peuvent s’Ă©loigner plus vite que la vitesse de la lumiĂšre. C’est le cas des galaxies au-delĂ du rayon de Hubble (environ 14 milliards d’annĂ©es-lumiĂšre). Pourtant, la vitesse de la lumiĂšre est indĂ©passable. Sauf que les galaxies ne se dĂ©ploient pas dans l’espace ; c’est l’espace en personne qui s’Ă©tend, entraĂźnant les galaxies dans son expansion.
Tant qu’on y est, Ă©voquons un instant l’horizon cosmologique : il correspond Ă la limite du volume d'espace d'oĂč l'on peut recevoir du rayonnement, ou plus prĂ©cisĂ©ment un signal, par exemple des ondes gravitationnelles, se dĂ©plaçant Ă la vitesse de la lumiĂšre. Autrement dit, c’est la limite de l’Univers observable, soit 46,5 milliards d’annĂ©es-lumiĂšre, selon le modĂšle standard de la cosmologie.
Tout comme les lignes et les surfaces sont plates ou courbes, les volumes peuvent l’ĂȘtre aussi. C’est ce qu’ont dĂ©couvert Gauss et Riemann au XIXe siĂšcle. Mais il est vrai qu’on a du mal Ă se reprĂ©senter un volume courbe, mais il faut faire avec.
Imaginons qu’on navigue parmi les galaxies. Si l’espace est plat et l’Univers infini, nous verrons indĂ©finiment entrer de nouvelles galaxies dans notre champ de vision.
Mais si l’espace est fini et courbe, aprĂšs un certain temps, selon la courbure, nous pourrions voir les mĂȘmes galaxies revenir. L’Univers serait alors illimitĂ©, comme la surface de la Terre, mais Ă©galement comme elle de dimensions finies.
Einstein nous dit que l’espace cosmique pourrait avoir une courbure. Ce qui signifie aussi qu’il pourrait ne pas en avoir. Cela va de soi.
Alors ?
Alors, aujourd’hui, l’Ă©tude du rayonnement fossile nous permet de dĂ©terminer la courbure de l’espace cosmique compte tenu de la distribution des points des rĂ©gions les plus chaudes et ceux des rĂ©gions les plus froides.
Et ?
Et, aprĂšs de savants calculs, elle nous dit que l’espace cosmique a une courbure nulle (avec, bien sĂ»r, aux incertitudes observationnelles prĂšs).
D’oĂč cette conclusion tĂ©mĂ©raire : comme on a du mal Ă imaginer l’Univers fini dans un espace plat, l’Univers serait donc infini !
Mais holĂ , holĂ ! Prudence ! Rien n’est prouvĂ©…
Ci-dessous : le rayonnement fossile, ou fond diffus cosmologique. Son examen a conduit Ă la conclusion de la courbure nulle de l’Univers.