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Serge Gainsbourg

La Rédaction


 Apparu tardivement sur scène, au temps de la « chanson rive gauche » de la fin des années 1950, Serge Gainsbourg (1928-1991) a rattrapé le temps et devancé son époque à coups de refrains éternels, éclairs de poésie et provocations diverses qui ont fait de ce fils d'immigrés russes l'une des figures tutélaires de la vie artistique française. Le verbe cynique, l'élégance dandy, la poésie majeure et les coups de cafard de « Gainsbarre », noyé dans l'alcool et la cigarette, ont façonné la légende d'un auteur, compositeur et interprète dont l'oeuvre et l'influence n'ont cessé de grandir après sa mort. Chanson, jazz, rythmes latins ou africains, rock yéyé ou psychédélique, reggae, funk, rap et musiques de films sont passés sous le filtre de sa plume moderne, qui a laissé de multiples classiques dont « Le Poinçonneur des Lilas » (1958), « La Javanaise » (1962), « Comic Strip » (1967), « Requiem pour un con » (1968), « Je t'aime moi non plus » (1969) et « Aux armes et caetera » (1979). Auteur d'albums ambitieux tels Histoire de Melody Nelson (1971) et L'Homme à Tête de Chou (1976), cet orfèvre de la mélodie a usé de son surplus de créativité - et de son pouvoir de séduction - pour des interprètes majoritairement féminines : Michèle Arnaud, Juliette Gréco, France Gall (« Poupée de cire, poupée de son » et « Les Sucettes »), Brigitte Bardot (« Harley Davidson »), Anna Karina, Catherine Deneuve, Isabelle Adjani, mais aussi Claude François, Serge Reggiani l'ont chanté, sans oublier les albums pour ses compagnes Jane Birkin et Bambou, ainsi que pour sa fille Charlotte Gainsbourg. En tois décennies d'activité, l'homme en jeans et Repetto à la barbe de trois jours a élevé la chanson en art et nourri sa postérité de mots et de musiques intemporels.

Issu d'une famille d'émigrés juifs Russes installés à Paris en 1921, Lucien Ginsburg est élevé dans la religion des arts, en particulier la musique classique que son père, pianiste de music-hall, joue pendant des heures à la maison. Après la guerre, passée sous le signe de l'exil de la peur de ceux marqués par l'étoile jaune (la « yellow star » comme il l'appellera), il veut devenir peintre mais, par nécessité alimentaire et impulsion paternelle, se retrouve dans les cabarets comme guitariste-pianiste.

En 1954, c'est le début des saisons d'été Chez Flavio au Touquet et des nuits au Milord l'Arsouille à Paris. Lucien Ginsburg dépose ses premiers titres à la SACEM à partir de 1957, ils le seront sous le nom de Serge Gainsbourg et commenceront à être interprétés par sa patronne Michèle Arnaud. 1958, le patron du Milord, Françis Claude, lui fait ses premiers pas sur scène. Repéré par le label Philips, il entre en studio et commence sa fructueuse association avec Alain Goraguer, déjà arrangeur de Boris Vian. C'est le premier succès avec « Le Poinçonneur des Lilas ». Il entre vraiment dans la profession, part en tournée avec Jacques Brel et, supporté par Boris Vian, rencontre Juliette Gréco. Débute une collaboration qui durera tout au long de cette période « rive gauche » dont le point d'orgue sera « La Javanaise » à l'automne 1962.



Albums, tournées, se succèdent. Sur scène, son hyper-sensibilité morgue et son physique particulier provoquent souvent des réactions de rejet. En coulisse toutefois, il est déjà un explorateur assidu du continent féminin et en tirera ses meilleurs textes. Mais son style, littéraire, sombre et très appliqué, commence à dater, l'heure n'est plus aux cabarets. Gainsbourg donne dans l'avant-garde et le jazz sur l'album Confidentiel (1963), puis dans les rythmes exotiques sur Gainsbourg Percussions (1964). Le changement est là...mais le succès non. Celui-ci, quasiment prémédité, va venir de sa collaboration avec la chanteuse France Gall et « Poupée de cire, poupée de son » qui remporte le Concours de l'Eurovision en 1965. La projection que Gainsbourg fait de ses textes à double-sens sur l'image enfantine de France Gall crée le décalage, le sommet étant atteint avec « Les Sucettes » en 1966.

Argent, nouveaux interprètes, nouvelle période, certainement la plus mature, intense et créative. C'est la pop et les comics, les Beatles dominent la planète et à la télé Serge multiplie ses apparitions, notamment dans le Sacha Show de Distel. Avec Michel Colombier, son nouvel arrangeur, Serge Gainsbourg va parfaitement être dans la pulsation de l'époque et chercher le son de la pop anglaise au coeur du Swinging London. On notera entre autres « Comic Strip » (1967) mixé par Georgio Gomelski, la B.O. du film Le Pacha, véritable beat samplé avant l'heure (1968), « Elisa » (1969). En 1968, un événement va bouleverser et transcender sa production : sa brève mais intense histoire d'amour avec Brigitte Bardot, star mondiale à l'époque. C'est la sortie de « Bonnie and Clyde », l'enregistrement de « Je t'aime moi non plus » juste avant leur rupture. (titre dont B.B. bloque la sortie par peur pour sa carrière) et enfin l'hommage baudelaurien et baroque de « Initials B.B. ».

Suit sur le tournage de Slogan, l'autre rencontre : l'Anglaise Jane Birkin, très jeune mère déjà séparée de son premier mari John Barry, et dont Gainsbourg devient le Pygmalion. La sortie ré-enregistrée avec elle de « Je t'aime moi non plus » va faire à la fois un scandale et un tube mondial. En 1971 sort l'album avant-gardiste Histoire de Melody Nelson, fruit de sa collaboration avec Jean-Claude Vannier. Chef-d'oeuvre baroque, symbolique, concentrant la pop la plus aboutie et les orchestrations classiques. Jusqu'à L'Homme à Tête de Chou en 1976, et à l'exception de Vu de l'Extérieur (1973), Gainsbourg explorera cette veine du concept-album, notamment avec règlement de compte provocateur avec ses années de guerre sur Rock Around the Bunker, album encore injustement évité aujourd'hui. Il enchaîne ensuite une série très alimentaire de tubes de l'été, de « L'ami caouette » (1975) à « Sea Sex and Sun » (1978).

À nouveau en décalage avec l'air du temps (entre temps les punks ont débarqués), il réapparaît sur scène lors d'une collaboration avec le groupe Bijou, puis trouve une nouvelle veine qui va le faire à nouveau, et même plus que jamais auparavant, entrer en résonance avec son époque : le reggae. Il enregistre avec Robbie Shakespeare et Sly Dunbar à Kingston les albums Aux Armes et caetera (1979) puis Mauvaises Nouvelles des Étoiles  (1981). Le succès est énorme, doublé de polémiques liées à sa reprise de l'ymne national « La Marseillaise », devenu « Aux armes et caetera ».

Mais en 1980, Gainsbourg-Birkin c'est fini, et ces albums introduisent un nouveau personnage : Gainsbarre (« Ecce homo »), personnage auto-destructeur et vulgaire. Gainsbourg a trouvé son ultime carapace, sa sensibilité à fleur de peau sera dorénavant cachée sous les provocations médiatiques. Pour ses deux derniers albums, Love on the Beat (1984) et You're Under Arrest (1987), « Gainsbarre » saura encore bien utiliser les pointures funk, rock et rap du moment, mais la redite n'est pas loin. On se souviendra davantage de l'extraordinaire engouement de la jeunesse pour ses concerts, qui, du coup, pouvaient retrouver des sommets d'émotion, tant cet accueil le touchait.

Serge Gainsbourg meurt le 2 mars 1991 d'un arrêt cardiaque à l'âge de 62 ans, « tué par Gainsbarre pour se venger de l'avoir créé » (Charles Trenet). Les collaborations réussies de son vivant sont innombrables. Les années 1990 verront son influence grandir encore, notamment dans le monde anglo-saxon. Son génie pour l'évocation d'émotions fugaces, sous-tendues par une maîtrise étonnante dans l'utilisation du meilleur des musiques populaires, font de lui un des phares de la chanson française du XXème siècle.

Début 2010, le film Gainsbourg (Vie héroïque) réalisé par le dessinateur Joann Sfar met l'artiste à l'honneur sur grand écran. L'acteur principal qui a la lourde tache d'incarner le héros, Eric Elmosnino, est entouré de Laetitia Casta (Brigitte Bardot), Lucy Gordon (Jane Birkin), Anna Mouglalis (Juliette Gréco) et Philippe Katerine (Boris Vian). Le film remporte trois trophées, dont celui du meilleur acteur, lors de la cérémonie des Césars le 25 février 2011. Au même moment, le vingtième anniversaire de la disparition de l'homme à tête de chou (et à la barbe de trois jours) est célébré en grandes pompes avec la découverte de la version originale de « Comme un boomerang » (1975) et la parution d'une troisième Intégrale en 20 CD et 284 titres dont 14 inédits.




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