Tableau de Jean-Baptiste Mauzaisse, Museo |
"GARE, LA CURÉE !"
Le 5 juin 1595 a lieu la dernière vraie bataille des guerres de religion en France. Henri IV, roi de France et entré dans Paris depuis l'an passé, doit affronter une armée des résidus de la Ligue Catholique qui ne supporte pas de voir cet ancien protestant sur le trône de France.
Alliés aux Espagnols, les partisans de Charles duc de Mayenne espèrent encore soulever la Bourgogne et se regroupent autour de Dijon dans l'attente des Espagnols arrivant de Besançon, alors ville espagnole.
Henri IV n'attend pas et se jette à leur rencontre sans attendre son armée qui doit le rejoindre au compte-gouttes. Il s'est fait précéder par son meilleur lieutenant et ami de toujours, le maréchal de Biron menant quelques centaines de cavaliers.
La confrontation a finalement lieu à quelques 40 km au Nord-est de Dijon à Fontaine-Française.
Des manoeuvres initiales de cavalerie ont lieu: les Ligueurs se jettent sur les cavaliers de Biron, quelques Espagnols suivent, l'avant-garde royale est enfoncée, Biron lui-même blessé gravement, est dangereusement menacé...
Alors, le roi de France n'écoutant que son panache de Béarnais fougueux et son amitié pour Biron, décide de rétablir lui-même la situation ! Mais son armée n'a pas encore rejoint et il ne dispose que de 200 gentilshommes l'accompagnant et d'une centaine d'arquebusiers de cheval; en face, plus de 700 à 900 lanciers et cavaliers espagnols et de la Ligue !
Qu'a cela ne tienne, le roi de 41 ans, retrouvant l'ardeur de ses 20 ans, met son casque, dispose ses hommes et donne ses derniers ordres à ses compagnons : "Faites tout comme je fais !"
La charge est partie ! Foudroyante ! Terrible ! Espagnols et Ligueurs, surpris, sont renversés sur place ! Deux lignes sont fracassées ! Le roi Henri IV, déchaîné au milieu des siens échappe à la mort cent fois: un seigneur se jette sur lui pour le protéger se faisant blesser de cinq coups de lance espagnols, un autre le sauve en explosant la tête d'un Espagnol en déchargeant à bout portant son pistolet qu'il gardait chargé en cas que le roi serait menacé... Le commandant des Ligueurs, Villars-Houdan, voyant le roi de France foncer sur lui, n'ose même pas l'affronter en duel singulier et se déporte...
C'est là qu'au milieu de la mêlée, Henri IV sauve la vie d'un de ses compagnons, Gilbert Filhet seigneur de la Curée, petit noble de la région de Vendôme, en lui lançant un puissant et méridional: "Gare, la Curée !" Se retournant brusquement, la Curée arrive alors à embrocher le lancier espagnol qui se jetait sur lui...
Et finalement, c'est le roi Henri lui-même qui parvient à dégager son ami Biron qui combattait toujours avec d'ultimes fidèles... C'est alors, cote à cote, que les deux amis du Sud-Ouest finissent cette charge d'anthologie...
Par la suite, les Espagnols ne voulant pas risquer leur armée pour les Ligueurs, se désengagent et se retirent sur Besançon. Mayenne et ses rescapés ne peuvent plus rien faire. Henri IV revient en triomphe à Dijon le 7 juin et s'en va ensuite à Lyon en juillet récupérer les lettres du Pape le félicitant pour son abjuration du protestantisme. Quelques mois plus tard, en janvier 1596, le duc de Mayenne se rend: les guerres de religion sont bien finies en France (il y aura certes des retours de flamme au 17ème siècle) et Henri IV est définitivement roi et de toute la France.
Mais en ce 5 juin 1595, à Fontaine-Francaise le "bon roi Henry" n'était pas passé loin de rester sur le champ de bataille en raison de son courage extraordinaire... Lui-même devait déclarer par la suite avec sa faconde habituelle: "J'ai bien souvent combattu pour la victoire mais à Fontaine-Française, j'ai combattu pour la vie." De même, sitôt la bataille finie, le roi écrit à sa soeur Catherine de Bourbon, qu'elle avait été bien prête de lui succéder à la tête de la France.
Enfin, ajoutons que le seigneur de la Curée vint vint chaudement remercier le roi de l'avoir sauvé à la fin de la bataille. Le roi se trouvant à cheval, la Curée l'agrippe par la jambe et lui dit toute sa gratitude et le bien qu'il pense de lui. Henri IV ne quittant jamais sa bonne humeur répond alors: "Voilà des paroles qui me font bien plaisir !"
Écrit par le bloguer: L'antre De Mars
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